Editorial : Le paradoxe des festivités déplacées, entre inaction et responsabilités

Dans notre pays, les situations socio-politiques chaotiques et l'insécurité ambiante ont créé un climat d'incertitude et de crainte. Face à ces défis, nous constatons avec préoccupation une tendance troublante : plutôt que de faire face aux problèmes de fond, nous nous laissons aller à la pratique de déplacer les activités habituelles d'une région à une autre. Cette approche superficielle nous empêche de poser les vrais problèmes et d'œuvrer à leur résolution.

Les exemples abondent. La commémoration de la mort de Dessalines, qui avait lieu traditionnellement au Pont Rouge, a été transférée au MUPANAH. De même, la fête du drapeau a été déplacée au Cap au lieu d’Arcahaie, et nous constatons que les bals des groupes musicaux se déroulent de plus en plus à Saint-Domingue. Pire encore, nous assistons à la délocalisation de festivals entiers vers l'étranger. Cette fuite des activités a des conséquences économiques, privant notre pays d'une rentrée financière potentielle.

En déplaçant des événements tels que la commémoration de Dessalines ou la fête du drapeau vers d'autres régions ou même des festivités à l'étranger, nous faisons face à une perte économique considérable. Les activités culturelles et festives attirent non seulement les Haïtiens vivant sur place, mais aussi la diaspora qui aurait pu contribuer à l'économie locale. Les petites marchandes, les chauffeurs de taxi et de moto, les hôtels et d'autres secteurs économiques en auraient également bénéficié. Au lieu de cela, ces opportunités se sont envolées vers d'autres pays.

Il est impératif de reconnaître que cette fuite de l'économie est préjudiciable à notre pays. Au lieu de déplacer nos ressources et notre potentiel vers l'extérieur, nous devons investir dans notre propre avenir. L'État doit jouer un rôle actif dans la création d'un environnement sûr et stable qui favorise le développement des activités locales. Cela nécessite des mesures concrètes pour renforcer la sécurité, lutter contre la corruption et promouvoir la stabilité socio-politique.

Nous ne pouvons pas continuer à adopter cette stratégie de déplacement et d'évitement. Il est temps de faire face aux problèmes de fond qui minent notre société. Nous devons poser les vraies questions et trouver des solutions durables. Il est inacceptable de penser qu'un jour, même la fête de l'indépendance pourrait être déplacée à l'étranger.

Il est temps de responsabiliser l'État et de lui demander de prendre des mesures immédiates pour résoudre ces crises. La perte économique causée par le déplacement de nos activités culturelles et festives est une réalité que nous ne pouvons plus ignorer. Il est essentiel que l'État reconnaisse l'importance de ces événements pour notre économie locale et prenne des mesures pour les soutenir et les promouvoir.

Nous ne pouvons pas permettre à notre pays de devenir dépendant des distractions étrangères. Nous devons créer un environnement propice au développement de nos propres activités culturelles, sportives et artistiques. Cela nécessite des efforts concertés pour résoudre les problèmes sous-jacents qui alimentent l'insécurité et la précarité. Nous devons mettre fin à cette fuite des activités et investir dans notre propre potentiel, en offrant à chaque Haïtien la possibilité de s'épanouir et de se divertir dans son propre pays.