Apres l'église catholique c'est au tour de la conférence des pasteurs haïtien de se faire entendre par le président Jovenel Moise

Dans une lettre ouverte envoyer ce dimanche 23 juin 2019, la conférence des pasteurs haïtiens exhortent le locataire du palais national de prendre au sérieux la crise socio-politique et économique du pays, l'insécurité qui fait rage et l'entêtement du président à sauvegarder le pouvoir face aux cris populaire de la nation.

Lisez la lettre et faite vous une idée !

Lettre de la Conférence des Pasteurs haïtiens au président Jovenel Moïse

Monsieur le président,
Profondément préoccupés par la dégradation accélérée de la situation globale du pays, nous nous permettons de vous écrire cette lettre pour vous exhorter à la sagesse, à la raison et à l’écoute du peuple haïtien qui vous parle depuis bientôt un an.

En effet, depuis les événements malheureux des 6 et 7 juillet 2018 provoqués par une décision irréfléchie de votre administration d’augmenter considérablement le prix des produits pétroliers sur le marché local, les haïtiens commencent à exprimer leur ras-le-bol par rapport à votre politique qui ne tienne pas compte de leurs préoccupations fondamentales. Cette décision avait provoqué des manifestations spontanées au cours desquelles de nombreuses pertes en vies humaines et matérielles ont été enregistrées.

Depuis lors, vous qui étiez élu par une infirme minorité de l’électorat (moins de 600.000 sur 4.2 millions), êtes devenu de plus en plus impopulaire parmi une population qui désapprouve votre politique et qui ne s’identifie pas nécessairement à ce que vous faites. Entre temps, vous avez déjà changé de premier ministre à deux reprises et vous en avez un troisième qui n’a toujours pas été ratifié. Tout semble indiquer qu’il ne le sera peut-être jamais. En fait, vous avez changé de premier ministre certes, mais votre politique que plus d’un considèrent comme contre-productive demeure la même. Et à aucun moment, vous n’aviez donné l’impression que vous étiez prêt à changer de direction. Vous avez péché par excès.

Monsieur le président, déjà l’objet d’un vaste mouvement de contestation populaire, vous affrontez la pire crise de votre présidence—une présidence marquée d’une inefficacité sans pareil. Cette crise qui se dégénère quasiment en révolte populaire, s’est amplifiée notamment avec la publication de l’accablant rapport de la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSCCA) qui vous indexe d’avoir participé dans la dilapidation des fonds du programme PetroCaribe.

Nous suivons avec le plus grand intérêt et la plus grande inquiétude aussi, les événements qui se déroulent depuis plusieurs semaines dans le pays où, à part la police, force répressive de l’Etat, plus aucune institution d’Etat ne fonctionne dans le pays. Dans la foulée, l’industrie, le commerce, les écoles, l’administration publique, le transport, les tribunaux, le parlement, bref, aucune institution ou presque ne fonctionne. Même le Sénat qui siège en permanence, semble avoir pris vacance aussi.

Personnellement, vous vous retranchez dans votre résidence, loin de la contestation qui, de jour en jour prend l’allure d’une insurrection populaire tout en réclamant votre démission afin de vous mettre disponible pour être entendu par la justice dans le cadre de votre implication dans des actes de corruption.

Monsieur le président, l’article 136 de la Constitution fait de vous le garant du bon fonctionnement des institutions du pays. Cependant, vous vous montrez totalement incapable de garantir un climat de paix et de stabilité dans le pays. Des exactions et brutalités policières sont commises au quotidien contre la population civile qui manifeste dans les rues contre vous. Des bandes armées qui seraient à la solde de votre régime prolifèrent à travers le pays et commettent, impunément, les pires exactions sur la population. Des massacres qualifiés de massacres d’Etat par les organismes des droits humains, ont été commis à la Saline, à Cité-Soleil, à Carrefour-Feuilles, à Tokyo (bas-Delmas) etc., votre administration et vous, feignez de n’être pas au courant de ces atrocités. Dans l’Artibonite, c’est l’ancien présumé chef de gang Arnel Joseph qui jouirait des largesses et de la protection de votre administration qui fait et défait sans s’inquiéter. À Trou du Nord, votre lieu de naissance, ce sont les hommes de l’armée Kosovo réputée proche de votre administration et à la solde de vos alliés dans la région qui empêchent de jeunes truviens opposés à votre politique de manifester leur mécontentement. Ces hommes armés ont brutalisé et blessé par balles, sous les regards impuissants de la police, plusieurs personnes.

Votre ultime tentative de rencontrer des secteurs vitaux du pays sur la crise, s’est soldée par un échec. Même certains de vos alliés ont décliné votre invitation. Autrement dit, monsieur le président, en plus d’avoir perdu le contrôle du territoire national, la majorité des secteurs clés du pays vous a lâché. Cependant, apparemment mal conseillé, il semble que vous vouliez résister et vous rebelliez contre la volonté populaire. Si tel est le cas, c’est sous-estimer l’ampleur d’une situation qui a échappé depuis longtemps à votre contrôle. Aujourd’hui, si vous vous entêtez à vous accrocher au pouvoir contre la volonté populaire, alors que vous ne dirigez pratiquement rien, vous risquez de conduire le pays vers le chaos total. Il est inutile et contre-productif de vouloir diriger un peuple qui n’a pas confiance en vous. Établir une dictature, est la seule façon que vous parviendrez à diriger un peuple qui vous rejette et vous déteste parce qu’il se sent trahi par celui qui devrait le protéger. Même dans ce cas extrême, cela ne devrait pas durer. Monsieur le président, la sagesse et le bruit de révolte populaire qui gronde un peu partout à travers le pays, vous recommandent de démissionner et de vous mettre disponible pour la justice. Il ne sert à rien de chercher à convaincre l’opinion publique sur votre innocence des faits qui vous sont reprochés. C’est devant les tribunaux, pas dans la presse ou les réseaux sociaux qu’on traite les questions liées à un crime quelconque. Seul un tribunal peut innocenter un individu accusé de corruption. Pour votre honneur, celui de la présidence, institution prestigieuse, celui de votre famille et celui de votre camp politique, acceptez, monsieur le président de faire ce sacrifice qui préservera le pays que vous dites aimer, de nouveaux malheurs.

Enfin, sachez monsieur le président, que démissionner est un acte de grandeur et non de lâcheté. Il est donc temps de rendre le tablier.

Espérant que vous entendrez raison et que vous renoncerez à toute envie de vous accrocher au pouvoir, nous vous prions, monsieur le président, de recevoir nos salutations patriotiques.

Rév. Pasteur Ernst Pierre Vincent - Président du Conseil Exécutif
Rév. Pasteur Abraham Loreston - Coordonnateur National
Rév. Pasteur Jean Denavard Tranquilus - Secrétaire Exécutif
Rév. Pasteur Dorvila Normil - Secrétaire Exécutif Adjoint
Rév. Pasteur Ismael Baptiste - Chargé d’affaires financières
Rév. Pasteur Frisnel Donné - Coordonnateur du Centre (Bas-Plateau)
Rév. Pasteur René Goude - Coordonnateur De l’ouest I
Rév. Pasteur Wilfrid Petit-Frère - Coordonnateur de l’Ouest II
Rév. Pasteur Audin Cadet - Conseiller

Daphnée CEBIEN

Journaliste / Directrice de Rédaction

23/06/19 0 403 0

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